• Temps de cerveau disponible.

     

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    Ils s’installent. Bruit de bancs, rires qui débordent, objets qui tombent. C’est la mise en place d’une classe. Des tonalités de téléphones fusent, ça et là. Tantôt un air de « merssaoui », tantôt un « arenbi » du dernier cru disent-ils. Ils viennent encombrés de sons et d’effets. Ils conjuguent leurs verbes dans un préservatif imparfait.

    Autrefois on s’asseyait sous un arbre devant le maitre. Le silence était offert au maitre de peur de troubler la posture de celui qui sait.

    Tiens là, je leur parle, ils m'écoutent. Il y a dans ma tête un vide étrange, je répète par une mécanique habituelle mon cours. Les mots sont indifférents, c'est toujours le même cours. Le sujet est réel, vous pensez, mais les visages sont indifférents.

     Quelle étrange faculté que de pouvoir parler couramment tout en pensant à autre chose. J'ai deux cerveaux comme l'autre avait deux téléphones portables.

    Deux cerveaux simultanés,  c'est pas le genre de Amr  Diab  ça!

    Deux cerveaux, un pour moi, un pour eux. Eux aussi. Un pour eux et l’autre plus petit évidemment, pour moi.

    Pour eux, je débite mon cours, je réponds aux questions, mais la moisson questionneuse n'est plus ce qu'elle était. Les Short Message Service (SMS)ont fini par grossir le cerveau pour eux.  Les clients de nos jours consomment et se taisent, et c'est tant mieux, mon autre cerveau se développe à tel point parfois que l'autre s'écrase. Il serait temps d'arrêter l'enseignement.

    Je les vois là, ils n'ont pas lu grand-chose, tripotent leurs jouets aux commandes  à jamais inconnues de mes deux cerveaux. Ils sont braves, mais juste face à l’interdit.

    Les jeunes sont ternes. Pas d'enthousiasme. Ils rêvent de leurs téléphones portables, ils leurs parlent mais n'ont rien à dire. L’autre jour, une fille regardait les noms dans son carnet d'adresse de téléphone portable. Dans le café juste après, un type faisait la même chose le regard fixe, complètement absorbé.

    Ces zombies-là, aux doigts ankylosés, je leur demande parfois de poser une problématique, de faire un plan, de réfléchir.

    Et puis rien.

    Il serait vraiment temps que j’arrête l'enseignement.

     

    « Mais où courent ils tous comme des fous?Miles Davis 1969..."Agitation" »

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  • Commentaires

    1
    kb
    Mercredi 29 Septembre 2010 à 23:09

    hélas! l'époque de l'enseignement est en passe d'être révolue

    nous entrons à grands bruit de sonneries dans celle du renseignement ....

     

    et pas besoin de traque, les imbéciles se fliquent d'eux même

    2
    Jeudi 30 Septembre 2010 à 00:01

    Hey KB, tu te fais rare et je reste sur ma faim par rapport à l'âge d'or du blogging. Tu sembles avoir laissé un peu ton blog...le rss reste désespérement silencieux! Sinon je vois que tu pressens la fin d'une époque révolu dans l'enseignement! vu la rareté des commentaires ici, ton commentaire me suffira et me consolera largement dans le besoin bien légitime du bloggeur d'interagir avec d'autres bloggeur!

    ps: laisse moi ton gsm sur fesse le bouc!!!

    3
    kb
    Jeudi 30 Septembre 2010 à 01:02

    Jamal, tu ne vas quand même pas te décourager pour si peu? :)

     

    moi ça fait déja plud de 5 ans que je pédale dans la choucroute bloguesque...ça fait très vieux ça à l'échelle cybernétique 

     

    a vrai dire j'ai un pic de travil qui me phagocyte mon temps libre...me faudra bien un mois pour stabiliser la chose...mais t'inquiète je trouverai toujours le moyen de venir frayer par ci par là

     

    4
    Jeudi 30 Septembre 2010 à 09:41

    Salut les Vétérans !

    faut pas se décourager, vous avez raison !

    Mais votre blues de l'enseignement dans une autre culture que celle du renseignement m'a rappelé un livre qui m'avait gravement niqué le moral lorsque j'en étais ressorti, un peu moins idiot certes mais frappé par le Hemm de qui vient de fHem.

    Il s'agit de "Globalisation de la surveillance", par un certain Armand Mattelart, un universitaire français qui vivait au Chili jusqu'au coup d'état de 1973.

    pendant qu'on y est, histoire de boucler la question et d'inciter blogueurs et visiteurs à mieux utiliser leur temps d'intelligene disponible, ce résumé du bouquin en question, cc le site des éditions de la Découverte, merci Internet !

    "   Vidéosurveillance, fichage, empreintes génétiques, écoutes, puces RFID… Dans les régimes démocratiques, les différentes techniques d’intrusion dans la vie quotidienne des individus se multiplient, au nom de la lutte contre les « nouvelles menaces ». La « guerre contre le terrorisme » n’a fait que rendre plus oppressant ce monde qui nous rapproche de celui imaginé par George Orwell dans 1984.


    Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Comment les sociétés démocratiques ont-elles accepté que leurs droits et liberté soient peu à peu amputés par des dispositifs de surveillance de plus en plus sophistiqués ?


    De l’anthropométrie du XIXe siècle au Patriot Act, en passant par l’analyse des doctrines militaires et du projet Echelon, Armand Mattelart construit une généalogie de ce nouveau pouvoir de contrôle et étudie sa dynamique de mondialisation. Il montre qu’au nom de la défense de la liberté et des impératifs de sécurité nationale, les États ont construit et imposé une définition de l’ennemi de plus en plus floue, tellement floue qu’elle a permis et permet encore tous les abus.


    Ce livre invite à une prise de conscience indispensable à l’heure où le seuil de tolérance des sociétés démocratiques à l’égard de la surveillance ne cesse de baisser."

     

    évidemment ça n'est pas suffisamment une raison pour s'effrayer au point de cesser de frayer...

    5
    kb
    Jeudi 30 Septembre 2010 à 12:18

    Les« lumières » s’éteignent à l’orée d’un siècle moribond et si la montagne reste belle, qui pourra encore s’en soucier tant les impératifs de vie se retrouvent  dictés à l’aune du sécuritaire imposé pour le bien-être de tous…la grosse entourloupe du siècle.

    Au pied de sa montagne de cadavres, l’humanité refait  son humanisme à coups de guerres fratricides, de génocides « nécessaires » et d’exterminations « préventives » dans une tradition, démocratiquement dégraissée, pour se vouer corps et âmes au consumérisme  social, seul standard désormais reconnu comme levier d’universalisation de l’espèce.

    Sous les coups de burins d’un re-façonnage médiatique, l’humanité s’embourgeoise à grandes doses de jeux télévisés, de « il ne fait pas bon vivre ailleurs », de menace terroristes, de débats identitaires…bref, l’humanité se couardise acceptant, avec soulagement , la collusion naturelle entre la culture du confort et le révisionnisme.

    Aux orties le foulard en même temps que la raison ! Au bûcher les racistes en même temps que la diversité culturelle. Acceptez l’alternative du « zoo » à la jungle du prosélytisme de tout poil. Acceptez ce monde meilleur qui vous est offert par les « bigs brothers » du poulet à l’hormone, de la carte biométrique et de la camera de surveillance pour le bien être de tous. Acceptez le jeu démocratique en consentant par l’acte de vote à remettre votre « raison » et limitez vous à vous vautrer en toute sécurité dans une bourgeoise citoyenneté…

    Acceptez de devenir cochons, mais ne venez pas après pleurer votre condition de saucisson

     

    j'avais écris en gros cela à la mort de ferrat...jean :)

    6
    Samedi 2 Octobre 2010 à 10:41

    Pour avoir cotoyé le monde de l'enseignement depuis des décénies, je trouve cette description d'une classe actuelle dramatiquement "vraie"!

    Mais ce n'est pas une raison pour que les enseignants baissent les bras!

    Chaque génération de "maitres" - à quelques niveaux que ce soit - a connu des difficultés de communication avec ses éléves, collégiens, lycéens ou étudiants! Il faut s'adepter sinon c'est la fin de tout!

    Courage!

     

     

    7
    Samedi 2 Octobre 2010 à 12:12

    @kb: non je résiste cette fois à la paresse et je me fais une discipline, une plage horaire exclusive au glandage raffiné où je laisse décanter les instants furtifs de la journées, je les revois et j'y trouve des choses!

    @ salvadorali: merci pour le paratage et la synthèse, mais je t'avoue cher ami n'avoir pas pu faire le lien ma préoccupation sur la perturbation des apprenants...et la surveillance génético-video-de la populace! moi je rêve encore de la classe sous l'arbre! et comme disait le héros Hyppolite "dans chienne de vie", "je suis tellement anodin et nul que je n'ai même pas besoin d'avoir des papiers...je ne nuis à personne, ma bagnole est nulle, mon costard est nul...et je dois certainement pas existé " :-))

    8
    Samedi 2 Octobre 2010 à 12:22

    @citoyenhmida:merci d'être venu ici. J'en conviens cher ami, au bout de 30 années de durs labeurs, je peux voir venir! Je suis au delà du simple piège de non-communication! Le médium ni les canaux ne sont peut être plus les mêmes devant un classe occupés par des êtres qui n'ont jamais vu leur mère allaiter, mais avaient déjà des zapettes de TV pour naviguer dans des appareillages qui ont forgé leur passivité...j'ai conclue sur l'impression que nous à la lisière d'une ére en matière d'enseignement et que l'arbre dont je rêve, ne capte pas le wifi!

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