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    Ils s’installent. Bruit de bancs, rires qui débordent, objets qui tombent. C’est la mise en place d’une classe. Des tonalités de téléphones fusent, ça et là. Tantôt un air de « merssaoui », tantôt un « arenbi » du dernier cru disent-ils. Ils viennent encombrés de sons et d’effets. Ils conjuguent leurs verbes dans un préservatif imparfait.

    Autrefois on s’asseyait sous un arbre devant le maitre. Le silence était offert au maitre de peur de troubler la posture de celui qui sait.

    Tiens là, je leur parle, ils m'écoutent. Il y a dans ma tête un vide étrange, je répète par une mécanique habituelle mon cours. Les mots sont indifférents, c'est toujours le même cours. Le sujet est réel, vous pensez, mais les visages sont indifférents.

     Quelle étrange faculté que de pouvoir parler couramment tout en pensant à autre chose. J'ai deux cerveaux comme l'autre avait deux téléphones portables.

    Deux cerveaux simultanés,  c'est pas le genre de Amr  Diab  ça!

    Deux cerveaux, un pour moi, un pour eux. Eux aussi. Un pour eux et l’autre plus petit évidemment, pour moi.

    Pour eux, je débite mon cours, je réponds aux questions, mais la moisson questionneuse n'est plus ce qu'elle était. Les Short Message Service (SMS)ont fini par grossir le cerveau pour eux.  Les clients de nos jours consomment et se taisent, et c'est tant mieux, mon autre cerveau se développe à tel point parfois que l'autre s'écrase. Il serait temps d'arrêter l'enseignement.

    Je les vois là, ils n'ont pas lu grand-chose, tripotent leurs jouets aux commandes  à jamais inconnues de mes deux cerveaux. Ils sont braves, mais juste face à l’interdit.

    Les jeunes sont ternes. Pas d'enthousiasme. Ils rêvent de leurs téléphones portables, ils leurs parlent mais n'ont rien à dire. L’autre jour, une fille regardait les noms dans son carnet d'adresse de téléphone portable. Dans le café juste après, un type faisait la même chose le regard fixe, complètement absorbé.

    Ces zombies-là, aux doigts ankylosés, je leur demande parfois de poser une problématique, de faire un plan, de réfléchir.

    Et puis rien.

    Il serait vraiment temps que j’arrête l'enseignement.

     


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    Le train d'à peu-près six heures du soir est parti  avec du retard. Peut être pour avoir plus de clients et pour respecter la nonchalance des usagers. Chacun a l’heure qu’il veut. Des femmes, jeunes et vieilles un peu sordides avec des jellabas aux couleurs plutôt laides, se contentent d'une vie où la couture tient une place prépondérante. Elles en parlent en mode continu.

     Je remarque très vite, après avoir parcouru "L’Opinion", journal que je n'achète plus jamais,  qu'une  entreprise  de téléphonie rachète ses actions. Je ne comprends pas très bien pourquoi et je m'en fous, mais j'acquiesce. Je suis d’accord.

    Je remarque un peu après qu'enfin le soir s'annonce un peu plus tôt et qu'il fait crépuscule au départ : les jours raccourcissent. On parle ce matin sur les statistiques du cancer dans les pays développés. Un collègue me disait sa certitude : il y a les facteurs stress et la bouffe. Je lui répondais que les habitants des pays en guerre avaient bien de la chance, avec tout ce stress, de mourir d'une balle et pas d'un cancer. Il acquiesçait.

    Je pense qu'une sorte de psychanalyse facile a remplacé dans nos esprits un bout de nos certitudes. C'est de l'enchantement. Pour ma part, je préfère savourer la couleur des champs et leur sécheresse, que je renifle à distance et derrière une vitre , affalé sur du simili cuir  estampillé made in China. A l'heure où la croissance est une garce infidèle et fait la pute, sauf  en Chine, il y a des logos rassurants.

     


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